samedi 3 mars 2012

Métamorphose montagnarde

Par un soir de vent modéré, je me suis endormi sur cette chétive île où, à la nage, j'étais arrivé. La chèvre était plutôt discrète et ne béguetait qu'une seule fois par jour, comme si elle possédait un jeton de cri quotidien et que, parcimonieusement, à bon escient, elle devait l'utiliser. Je ne pense pas que tel système existât réellement, mais je ne l'entendis jamais plus d'une fois s'exprimer.

Il ne pleuvait pas, il ne faisait pas froid, mais il ventait. Un vent qui n'était pas assez fort et désagréable pour m'empêcher de dormir, ni non plus pour me caresser et m'enjôler dans un sommeil lourd et porteur. Un vent assez fort pour faire bouger la mèche et l'épi, assez fort pour me jeter du sable au nez comme une fée maladroite ou tout simplement stupide.

Je m'endormis donc. Légèrement agacé.

On ne peut pas dire que ce séjour sur l'île fusse des pires. Il y a bien la fée Morgane armé de son bâton à son et de ses herbes de la nuit sans lune qui vint, aussi le Duc d'Anjou, ses bouteilles, ses tuyaux et ses histoires. Bref, on ne peut pas dire que l'on s'ennuyât. Mais je me demandais en mon sein ce que cette île rêche et sèche pouvait bien m'apporter comme trousseau outre les visites de mes amis.

Je dormis donc dans le giron de cette nuit venteuse, agité par les caprices et les volutes de l'air en mouvement.

Ce fut un contact humide contre ma joue qui me tira du tourbillon nocturne. J'ouvris les yeux et la chèvre me regardait d'une manière neutre et impartiale. Je lui rendis un regard d'adolescent outré, mais fut sidéré de constater que j'étais sur le flanc d'une montagne, une montagne chinoise, que la chèvre avait un pied attaché à une table sur laquelle reposait une assiette avec des croissants, du beurre, de la confiture et du lait.

Juste un peu en retrait, il y avait un magicien, un nain. Il me regardait avec curiosité.

La chèvre portait un collier avec une inscription. C'était écrit: vas-y!

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