mardi 30 décembre 2008

Déclaration annuelle des membres du conseil: Prince Amour/Reine Amertume

Chers amis,

Je suis en réflexion. Je pense abandonner mon poste de Reine pour devenir une femme normale qui vit dans le siècle. Je n'ai pas encore décidé, mais je voulais vous en faire part. Si cela se produit, je me trouverai un emploi et me construirai une maison.

Princesse Amour/Reine Amertume

Anselme a des questions

Il est arrivé sur sa planche à roulette avec un petit short rouge, un peu trop court. Ses muscles commençaient à saillir et un léger duvet couvrait sa lèvre supérieur. Plein de peau partout. Il a 13 ans.

A: J'ai des questions.
M: Ok, vas-y.
A: C'est qui mon père.
M: Je ne le sais pas. C'est pas moi. Je ne t'ai pas fait avec une femme. Tu es arrivé ici petit. On a vu une ombre venir te porter dans le sous-sol de la chapelle, c'est tout ce que l'on sait. Le reste est légende.
A: Ici, est-ce qu'il y a des gens qui ont des parents?
M: Bonne question...tout le monde a un début flou ici. Il y a seulement des histoires...
A: Bizarre...
M: Sauf moi, j'ai des parents...beaucoup. Des fois trop.
A: Est-ce que c'est l'fun?
M: Pas toujours, pas souvent. Disons que c'est "obligatoire".
A: Wow, fucké. Alors, c'est mieux de ne pas en avoir?
M: Non, c'est mieux d'en avoir, mais ça amène d'autres problèmes.
(Il pense)
A: Tu sais quoi? Mon pénis a grossi. J'y pense souvent et je joue avec.
M: C'est un moment agréable de la vie.
A: Je ne sais pas trop quoi en faire
M: Continue t'es dans la bonne voie.
A: Mais à un certain moment, je vais vouloir le montrer à quelqu'un d'autre...
M: Oui, je vois. Il va falloir te trouver quelqu'un de ton âge.
A: Il y en a pas ici...
M: mmmm bien vrai. Continue à jouer j'y pense. Allez, va!

mardi 23 décembre 2008

Déclaration annuelle des membres du conseil: Satan Brossard

Je vous emmerde!
J'exulte!
Je jouis!

Aaaaaahhhhhhhhh!


Satan

Princesse/ Reine Amour à la fenêtre

(Extrait du journal de la Princesse/Reine)


...Seule dans mon grand château vide. J'étais Princesse folle d'amour, je me heurtais sur les parois acérées d'une mer déchaînée, courais éperdue après l'autre, indifférent. Je me dépensais en une énergie volatile et désespérée...puis j'ai eu trop mal. Je me suis recluse, je suis devenu Reine et j'ai obtenu le dominion sur mes facultés, un empire sur moi-même et mes actions. Mais quoi? Je suis seule ici, triste et amère. Tellement amère que ça goûte mauvais dans ma bouche. J'aimerais le bonheur, des cieux enchantés, un tendre époux et redevenir la naïve princesse que j'étais. Prête à s'éprendre, à s'épandre et à se donner. Mais le ciel est lourd autour du Château et personne ne veut d'une reine d'amertume, grise et malheureuse. Que faire? Changer, disparaître?

Je ne sais dans quelle direction aller.

C'est sûr que je me fais prendre dans les couloirs du château par des laquais et des palefreniers, agréable, mais lassant. Mieux que rien.

Évidemment, manger un peu de sucre enlèverait l'amertume...peut-être acheter un fou de la reine...au moins, ce serait divertissant.

Difficile de se remettre en question lorsqu'on est Reine...Je crois que plusieurs ne veulent même pas passer au château à cause de ma sévérité, de mes demandes et de mes exigences. En devenant Reine, j'ai cessé d'être la proie des autres, de laisser la place à leurs exigences et leur velléités, mais je suis devenue inaccessible. Et cela m'isole...Peut-être devrais-je abdiquer? Devenir une femme normale, contemporaine, simple, m'inscrire dans le temps et l'espace?

Plutôt qu'être seule dans mon château et d'y moisir...

Je pense que je vais faire une fête de la nouvelle année...et je vais continuer à réfléchir.

vendredi 19 décembre 2008

Déclaration annuelle des membres du conseil: Terese von Wartburg

Chers concitoyens,

Je suis très fière de l'année accomplie. Merci de m'avoir accordé votre confiance. Je crois avoir bien rempli mon mandat de présidente. Les revenus sont en croissance et nous investiront bientôt dans plusieurs domaines. Je comprends que vous soyez toutes et tous fatigués! J'ai augmenté notre masse monétaire en nous inscrivant dans des activités lucratives, mais peut-être moins constructives. Il faudra faire attention au dosage entre les activités qui rapportent et celles qui bâtissent. Mon credo sera rapporter en bâtissant! Je crois que tous les habitants de l'île ont bénéficié de ce nouveau flot économique. Je vois que la gestion du temps entre le travail, l'argent et l'espace personnel demeure problématique et important. Je devais démarrer la machine. Maintenant, nous nous ajusterons. Surtout en allant vers des activités dans lesquelles nous sommes seuls à exceller et qui nous amène plus rayonnement et de retombées non-matérielles. Encore une fois bravo à toutes et tous!

Je me présenterai pour un nouveau mandat. J'espère que vous renouvellerez votre confiance.

Au plaisir,

TvW

Anselme sur sa trottinette

Il est arrivé plusieurs jours plus tard sur sa trottinette. C'était encore le même Anselme, mais beaucoup plus jeune à 10 ans. Il me souriait.

M: Anselme? Tu as rajeuni!
A: Oui, depuis que tu t'es excusé, je suis redevenu un enfant et je joue! Je voulais te dire que je te pardonne. Tu t'es trompé, c'est tout! Maintenant, je vais y aller. J'ai envie de jouer. Bye!

Étrange, mais logique.

mercredi 17 décembre 2008

Déclaration annuelle des membres du conseil: Jean Courtemanche

Chers amis,

Tout d'abord, je vous salue! Nous ne nous voyons plus souvent car entre les parties de pêche, mes voyages et les modèles à coller, je n'ai plus grand temps pour m'impliquer dans nos vénérables institutions. J'ai été pour l'île, pendant longtemps, une force vive. J'ai bâti notre chapelle et notre cathédrale, deux joyaux architecturaux de notre île, pour lesquelles nous sommes reconnus. J'ai été l'entrepreneur, le moteur de bien des projets. Mais je vieillis et ma force se calme. J'ai eu aussi le sentiment que mes efforts n'étaient finalement pas orientés vers un objectif réellement constructif, profitable pour moi et la communauté. J'ai construit deux magnifiques bâtiments qui ne sont que malheureusement peu utilisés à cause de notre petit nombre et du peu de visiteur que nous avons. C'est bien frustrant. Nous avons une superbe réputation, mais cela nous rapporte peu. Je ne suis pas certain que ce soit le moment de poursuivre dans cette direction. C'est pour cela que j'ai pris ma retraite: afin que les énergies des acteurs de cette belle île soient déployées vers un objectif plus facilement mesurable pour tous. Je concède que TvW a fait un travail immense dans la réorganisation des finances de l'île et dans la conduite des projets. Je voudrais par contre attirer son attention sur quelques points: elle devrait faire attention à la santé et à la fatigue des habitants, à veiller à déployer les énergies de tous vers des projets enrichissants et constructifs et à ne pas se mettre au service de l'or et de l'argent. Je la sais très habile et intelligente et je ne crains donc pas qu'elle y veillera.

Je vous Bénis,

Jean Courtemanche

Journ'île: Assemblée du conseil

Madame, monsieur,

Il me fait plaisir de vous convoquer à l'assemblée annuelle plénière de notre île. Je suis à l'heure des bilans suite à ma première année en tant que présidente du conseil.

Seront à l'ordre du jour: Brisbane II, suite; investissements futurs; rapport des différents ministères; élection du prochain conseil et de la présidence.

Je demanderais à tous les membres de notre conseil d'entamer une réflexion personnelle sur l'évolution de leur dossier et de leurs relations pour faire de bon choix et de dresser un ordre de priorité.

Un fastueux banquet sera servi pour clore l'année.

TvW

Anselme veut savoir

J'étais assis sur le bord de la cathédrale, fumant un calumet. Anselme s'est planté devant moi et lança à mes pieds un volatile mort.

A: Tiens, j'ai chassé cette poule pour toi!

Je regardai tristement la bête. C'était un magnifique faisan plein de panache avec une hampe de plus comme mille feux.

M: c'est un faisan, Anselme.

Il sembla alors interloqué, ne sachant pas trop ce que c'était. Il joua un peu avec la terre du bout de son pied et je l'invitai à s'asseoir auprès de moi. Il s'assit visiblement tendu de notre rencontre.

A: Tu as quelque chose à me dire, je le sais. Je te vois me regarder de biais depuis plusieurs jours.

M: En effet.
A: Quoi?
M: Je me mis à sangloter. Je voulais te dire que je m'excuse, que je suis faible, que je me suis trompé, que je t'ai fait du tort. Je croyais que tu étais un ogre qui mangeait les petits enfants, qui les auraient écrasés et détruits, mais c'était tout faux.
A: Pourquoi aurais-je fait cela?
M: Je ne sais pas, je le supposais. C'est ce que je voyais.
A: C'est ridicule! Tu es un pauvre con! Tu ne t'es pas occupé de moi sur de fausses assomptions, craignant que quelque chose arrive! C'est ridicule!
M: Je sais. Je dois te mettre par contre en garde: je vois que tu te dépasses, que tu deviens quelqu'un, que tu repousses tes limites, mais je sais que tu fais cela pour attirer mon attention, pour me prouver que j'avais tort, pour te montrer extraordinaire, digne de mon attention. Mais c'est une erreur ou à tout le moins une mauvaise motivation: tu aurais seulement pu être ordinaire, ou à tout le moins, seulement toi-même pour que je te supporte, c'est moi qui étais en faute et non pas toi! Je dois te prévenir que c'est une voie sans issue que celle-là. Je m'y suis essayé longuement, sans résultat. Je crois que je me fatigue énormément à prouver au monde que je suis extraordinaire. C'est un esclavage et souvent ça me rend triste. Il est vrai que j'ai acquis beaucoup de compétences, de vertus et d'expériences ainsi, mais ma jouissance et les résultats sont limités.
Je t'en conjure...fais-le pour toi. Essayer d'être plus parce que l'on est pas assez pour quelqu'un, c'est vain.

Il me regarda, soufflé. Aspira dans le calumet, s'étouffa et partit.

vendredi 12 décembre 2008

Anselme fâché

Quand il me voit, il me fuit, le regard mauvais. Il continue à être un héros: se dépasse partout, fait de la musique, chante des airs de bravoure, du Wagner, du Bellini, du Strauss. Il est bon dans tout, se dépasse, est beau et s'organise pour que je voie ses succès de loin.

Mais il est furieux, parce que je n'avais pas su déceler plus tôt tous ces talents, qu'il me dégoûtait, que j'avais peur de lui, le croyait une menace à ma personne et aux autres. Ce que j'avais imaginé de lui est tout autre que ce que j'avais cru. Je m'étais trompé, complètement. Et il a voulu me le prouver. Me montrer que mes assomptions étaient fausses, que j'avais tort.

Moi, je me sens misérable de ne pas avoir aimé mon fils. Mais est-ce mon fils? Pas vraiment. C'est mon fils adoptif. J'en ai la garde et j'en suis le tuteur. Ainsi, je me sens moins misérable, mais encore là, j'ai failli à ma tâche.

Tristement, je sens qu'il n'y a pas d'espace pour le pardon de sa part. Les jeux sont faits, il s'est durci. Je viendrais pleurer à ses pieds en m'étendant en excuse, que ça ne donnerait rien. Ou peut-être dans une petite case de son âme, se sentirait-il soulagé de voir que moi son père, je suis un faible, un lâche, une merde, un humain à l'âme molle?

Je n'en sais rien.

vendredi 21 novembre 2008

Anselme-La suite

Anselme fait des exercices physiques chaque matin qu'il a appris de Gontran. Il est devenu très massif et a perdu presque toute la graisse qui le recouvrait. Il a aussi une assurance incroyable. Il ne me parle presque plus: il fait des choses. Il est très musclé, a un regard d'acier. C'est une transformation complète. Il s'exerce.

Il fait aussi des vocalises en se regardant dans le miroir. En fait...il ne veut plus trop de mon attention parce qu'il peut se prolonger dans le regard d'autres personnes, apprendre autres choses. Il veut seulement que je suive de loin ses exploits et que je me réjouisse de ses progrès. Mais il ne le fait pas pour moi. Il est en expansion.

Voilà!

lundi 3 novembre 2008

Brisbane II Gold

Toujours à l'ancre dans la mer des Caraïbes le Brisbane II a maintenant un pont en or. C'est plutôt glissant et de mauvais goût, mais le propriétaire (un riche armateur grec) a décidé de sauver de l'impôt en dotant le Brisbane d'un pont en or. Il se passe très peu de choses. Le soleil, les vaguelettes, les poissons, les BBQ, les orgies; l'habituel, quoi.

Des fois, je me demande si c'est bien intéressant tout cela. Je pense à ces moments où je pêchais des joyaux dans la mer agitée et que je remplissais mes coffres de pierreries insensées. Mais j'ai été si fatigué et j'ai eu si peur dans la mer en furie avec ma coquille de noix, craignant d'être englouti par les flots furieux et d'y perdre ma vie et mon bateau.

Oui, je suis calme dans la mer des caraïbes et il y a si peu de choses à faire. C'est relaxant. Mais je sais que je ne resterai pas là, éternellement. Telle n'est pas ma nature. Je me prépare quelques expéditions rien de trop fou. Mais j'ai des plans...aller à la découverte, partir à l'aventure.

En attendant, frottons le pont doré du Brisbane II et sourions.

Anselme rencontre

Il se promène avec son panier de victuailles et gambade sur l'île arrêtant les passants.
Satan continue à avoir peur de lui. Terese lui a donné un oeillet et lui a demandé gentiment de sortir de son bureau. Gontran a essayé de lui montrer de tirer à l'arc, mais il a eu peur et s'est esquivé en souriant. Brahma lui a montré à respirer pour être plus calme, Muhammad l'a amené au bord de la mer pour discuter du paysage et de l'air marin.

Autrement, c'est Adrianna Gourd qui l'a pris sous son aile. Elle lui donne des cours de chant. Elle sait qu'il est ténor et elle pressent une grande voix. Grande sensibilité, grande puissance, mais pas encore prêt. Il chante soprano et a une magnifique voix. Mais un jour ça prendra des couilles. Elle l'y amènera.

mercredi 29 octobre 2008

Généalogie d'Anselme

Une nuit vraiment noire, une femme voilée vint sur l'île (certains disent la princesse, d'autres Terese, ou encore une inconnue) un panier sous le bras et un enfant braillant dedans. Elle passa comme un spectre, un ombre évoluant dans la pénombre. Tous se turent, terrés dans leur maison feignant le sommeil, complice silencieux de l'abandon. La femme pénétra dans la Chapelle et alla abandonner l'enfant dans les sous-sols de la bâtisse, laissant l'enfant là pour mort. Pendant toutes ces années, chacun des habitants de l'île se relaya pour subvenir aux besoins vitaux de l'enfant. Mais cette entente était tacite et personne ne prit véritablement la charge de l'enfant. Pourquoi une telle honte autour de cet enfant, une honte venue de la mère même et poursuivie par les îlois? Quelles étaient les circonstances qui avaient présidé à sa conception?

Anselme grandit alors seul, enfant bénificiant du peu d'attention et d'amour qu'on lui offrait, déprimant dans son trou, nourrit à la honte qu'on éprouvait de lui. Fixant le mince rayon de lumière qui lui parvenait du soupirail.

Comment enfin survit-il? Enfin, c'est une question à laquelle je n'ai pas de réponse.

Lorsqu'Anselme sortit enfin à l'air libre, la grand conspiration se dégonfla et ce fut enfin aux acteurs de sa contention à ressentir la hont de leurs actes. Tout cela était plutôt étrange, car Anselme ne faisait a proprement parler rien à part être présent. Gazouillant à l'air libre, se roulant dans le gazon, parlant aux passants, chantant, s'adressant aux enfants.

Je sais qu'Anselme voudrait que je m'occupe de lui, que je sois son père, son tuteur aimant et présent, mais je ne suis pas encore capable. Je le trouve répugnant, gras, bavant, manquant de civilisation, trop aimant, débordant de lui-même. Mais je sais que ça le détruit, ça le fait devenir fou et que sans moi, il restera éternellement à la cave où il a grandi et moisi.

J'ai peur qu'il m'aime trop.

mardi 14 octobre 2008

Anselme est prêt

Je suis descendu à la cave et il était prêt. Ses pantalons bien mis, les lacets lacés, le noeud papillon tout droit et dans sa main un petite boîte à lunch brun-beige, tout ce qu'il y a de plus horrible. Et comme à l'habitude, il me dégoûtait un peu. Un grand bébé de 6'3'' gras et suant. Les cheveux blonds frisés et un air de chien excité et peureux. Rien de bien sympa.

Je lui montrai ses nouveaux crayons et sa plaquette de feuilles pour dessiner. Il les manipula fébrile et trépignant d'un bonheur intense. Il poussait de petits cris d'excitation. Je souriais à la fois heureux et gêné. C'est moche avoir honte de quelqu'un.

Je le regardai et lui demandai: Que fais-tu ainsi au pied de la porte. Il me répondit franchement: nous partons.

Moi: "Et où?"
Anselme: " À l'extérieur"

J'allais riposter, mais je me rendis à l'évidence que je ne pouvais plus faire autrement. Nous montâmes les 1053 marches de la cave et nous nous rendîmes jusqu'à la chapelle. En sortant du réduit, satan nous aperçut et fut profondément surpris:

"Crisse, yé dont ben gros"

Anselme s'approcha et se pencha juste au-dessus de Satan et le couvrit de son ombre. Satan s'effraya et rentra les épaules. Et dit en souriant jaunement: "Ah, mais t'as l'air fort par exemple". Anselme retrouva son sourire habituel et caressa la tête de Satan, ce qui, je le sais, dut le faire profondément chier.

Il prit sa petite boîte à lunch et s'engagea vers la sortie de l'ombre. Il ouvrit la porte de la chapelle et respira un grand coup. Les îlois, réunis pour un discussion sur le plan de réfection de la Cathédrale, restèrent cois. Il souria, lumineux et dit, claironnant " Bonjour!".

C'est ainsi qu'Anselme émergea du monde des limbes.

samedi 11 octobre 2008

Correspondance du Capricorne

Mon cher ami Brahma,

C'est un penchant de ma personne que de m'intéresser aux faits. J'ai tout comme vous les yeux rivés vers le ciel, mais mon strabisme m'empêche de ne pas voir mes pieds sur le sol. Toutefois, je comprends bien que la réalité dépasse mes yeux et je vous invite par cette missive à spéculer avec moi sur la nature de l'inconnu et de son rapport avec nos vies.

Bien à vous,

Virgile

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Cher Virgile,

Comment allez-vous? Il y a bien longtemps que vous n'êtes pas venus me rendre visite; je vous sais fort occupé avec vos publications et recherches. J'ai en effet les yeux tournés vers le ciel, mais encore bien plus vers l'intérieur. Car pour moi, la nuit étoilée se poursuit en moi. Beaucoup d'espace et un peu de clarté. Quand je regarde les herbes qui poussent dans les craques du trottoir, je ne peux m'empêcher de voir qu'en notre univers, quelque chose veut, la vie veut. Et que cette énergie est forte et fondamentale, que bien des choses nous forcent à l'oublier, mais qu'à la base, elle est là partout. N'est-ce pas fascinant que de voir tout ce que nous avons édifié, les formes magnifiques de la nature, les couleurs qui nous entourent, toutes choses qui émerveillent mon regard. Et pour moi cette chose est claire: une réalité nous dépasse et elle veut, elle est omniprésente et d'une intensité inouïe. Je crois même qu'il est plus sage de ne pas lui donner de nom, car sa présence dépasse largement le langage ( et il est si facile de s'obstiner sur les noms qu'on donne aux choses; de plus lorsqu'on baptise, on nomme, on devient drôlement possessif). Bref, pour moi cela est de l'ordre des faits. Et non pas de la croyance. Je ne peux pas croire au fortuit de l'entreprise.

Cher Virgile, embrassez pour moi celui ou celle que vous aimez et envoyez moi cette délicieuse recette de lentilles toscanes qui fait les délices de ma bouche et le malheur de mon entourage,

Allez en paix,

B.M.

jeudi 9 octobre 2008

Polaroid

Satan court après plein de poulets. Il s'amuse ferme. Pas de pièce de théâtre pour l'instant, des rêves, des idées et des poulets.
Terese a rencontré les journalistes. Elle s'est fait faire une photo dans son bureau, souriante et affairée. Un peu femme d'affaire des années 50, dans son empire. Elle Projette des profits records.
Jean Courtemanche: revient de la pêche.
Anselme devient propre et se pratique à faire des boucles.
Adrianna arrive a une maturité qu'elle ne croyait pas possible. Son art lui apparait avec clarté et puissance.
Princesse Amour regarde l'océan. Elle s'est durcie. Elle regarde à l'arrière et sur la table sa couronne de Reine git.
Louis-Michel danse dans l'espace et réalise le rêve fou de Saint-Denys Garneau.
20 degré celsius. Brise marine. Soleil.

Anselme, l'ogre

Cette fois-ci, il ne pleurait pas. Il avait étendu ses excréments partout sur les murs et me fixait durement dans ses vêtements souillés. Je comprenais bien qu'il avait fait cela pour me punir de ne pas être venu le visiter plus tôt. Je pris un seau et une brosse et je me mis en frais de laver les murs. Une odeur d'urine séchée et de merde alourdissait la pièce. Je sentis qu'il devint plus léger à mesure que j'avançais dans l'ouvrage. D'une manière, je m'occupais de lui et je savais qu'il avait raison de se venger, alors je ne montrais aucun signe de mécontentement.

Un peu après, je sentis qu'il s'agitait, qu'il voulait se mouvoir. Je posai la brosse et vint m'asseoir à côté de lui. Je le sentais heureux et touché.

"À quoi rêves-tu?"
"Je rêve à des chèvres: elles montent dans la montagne et gambadent"

"Pourquoi des chèvres?"

"Parce qu'elles sont seules et avec les autres. Et que les loups peuvent les manger"

"Je vais t'acheter de nouveaux vêtements et aussi des crayons à colorier et du papier.
J'aimerais que tu apprennes à faire quelques chose entretemps. C'est toi qui choisis"

"Je vais apprendre à attacher mes lacets. J'ai quelque chose à te demander à mon tour: n'attends pas que je m'ennuie avant de venir. N'attends pas que je devienne fou et malheureux avant de penser à moi. Pourquoi ne t'occupes-tu pas de moi spontanément?"

Je mis à pleurer, debout face à lui dans le milieu de la pièce et lui criai:" Parce que j'ai peur!"
J'ai peur de toi. J'ai peur de moi.

Il me regarda et dit: Demain, je mettrai des vêtements propres et mardi, je saurai faire les lacets. Viens mardi.

lundi 6 octobre 2008

Une princesse vieillie, mais lucide

Princesse Amour se regarde dans le miroir. Elle a quelques rides et un regard plus acéré. D'innombrables prétendants se sont succédés en audience privée et personne n'en est reparti avec son coeur sous la cape.
Elle se regarde dans le miroir, sans doute un peu fatiguée et durcie. Elle se connaît maintenant, elle et ses envolées fracassantes. Très haut et puis, FLOUC...elle s'écrase par terre. Comme un goéland en indigestion de frites.

Ses pages lui ont ramené la rumeur que le Marquis de l'O. s'approchait de ses terres et qu'on prévoyait une chasse où des entretiens secrets auraient lieu. Princesse se prépare et on ne lui a jamais connu un regard aussi déterminé. Elle se sourit, car elle se sait devenir Reine. Pour le meilleur et pour le pire.

Parlons, négocions et l'on verra.

vendredi 19 septembre 2008

Une visite à l'ogre

Il était recroquevillé au centre de la pièce, avachi sur le plancher poussiéreux et il pleurait. Non pas des pleurs sereins et résignés, mais des soubresauts tragiques et déchirants. Je le regardais, triste et honteux de cacher cet être si négligé et peu encouragé en moi dans cette pièce. Je ne pouvais faire autrement que de le regarder de biais. Et moi aussi, j'étais triste. Dans un coin de la pièce, gisait une poupée de chiffon sale et désarticulée. Aussi une girafe en plastique.

Je m'approchai de lui et ai eu le courage de le regarder en face. Je suis responsable de lui comme des autres, après tout, me suis-je dit. Il cessa de pleurer peu à peu, intrigué par ma visite. Je vins ensuite m'asseoir à côté de lui, assez proche pour que nos vêtements se touchent. Nous restâmes ainsi côte-à-côte pendant un long moment, cois. Puis, il frétilla maladroitement pour se gratter, car il semblait être atteint d'une vermine quelconque. Il regarda de biais, honteux.

"Bonjour, l'ogre" dis-je.

On sentit le malaise l'envahir: quelqu'un lui parlait.

"Bonjour." dit-il à mi-voix et en jouant avec son pantalon.

Pourquoi pleures-tu? Tu sembles si triste.

Il recommence à pleurer.

Parce que je suis enfermé, parce que personne ne vient me voir. Je me sens si seul, avec mes malheurs, avec ma peine, avec mon histoire.

Pourquoi es-tu descendu me voir? Reviendras-tu? La première phrase avait été dite avec une crainte et l'autre avec un franc espoir.

Je suis venu te voir car tu pleurais et parce que je me sentais coupable.

Il semblait parfaitement étonné.

Tu te sens coupable? Pourquoi?

Parce que je crée ton malheur. Parce que tu ne te répares pas.

Il semblait ne pas comprendre tout-à-fait...

Je mis ma main sur son pantalon et je lui dis: je t'aime. Je vais revenir te voir.

Je quittai la pièce et fermai la porte que je laissai cette fois déverrouillé. Je l'entendis ronfler.

mardi 16 septembre 2008

La plaine

Je regarde devant moi et il y a une plaine infinie. Les blés se meuvent au gré du vent et le soleil dore les grains. Peut-être y a-t-il aussi un cours d'eau au loin, un peu de relief quoi, pour créer de l'intérêt. Je regarde et je me sens bien. Un peu las sans doute, mais rien de bien dense comme sensation. Derrière moi, je le sais, il y a une maison, c'est la mienne. Elle ressemble beaucoup à celles que l'on dessine quand on a 4 ans. Un toit en pignon, dans le centre du pignon, une fenêtre, sous la fenêtre une porte. J'y reste seul. J'y invite bien des étrangers quelques fois, mais ils ne restent que rarement pour la nuit. Pas 2 nuits. Ils n'ont pas vraiment de raison de ne pas rester, c'est juste ainsi. Peut-être, reste-je trop en retrait? Peut-être n'y a-t-il pas assez d'emploi dans la région? Peut-être, peut-être. C'est la réponse aux questions sans réponses auxquelles on essaie de répondre seulement parce que l'on se sent mal à l'aise devant les questions. À ces questions, on devrait faire comme aux enfants de 4 ans: Parce que. Donc personne ne reste à coucher...

Personne, sauf évidemment Louis-Michel avec qui je blague, avec qui je fais des soupers, avec qui je dors quand je me sens seul. Louis-Michel mon antidote à moi-même, celui qui réussit à m'aimer dans toutes les situations et à faire de cette maison un paysage continuellement ensoleillé, qui ne permet que les clairs-obscurs des nuages passant sur les herbes, celui avec qui il fait bon se terrer durant l'orage ou la nuit, la chandelle allumée parlant de son éclat sur les murs peints à la chaux.

À ma droite, un cercle d'hommes nus qui se courent après. L'un veut celui d'en avant, et ainsi de suite. Ils courent et ne s'attrapent jamais. Un mouvement ridicule du désir où chacun veut toujours l'autre sans jamais l'atteindre.

Plusieurs solutions:

1) Mettre une roue au milieu et les obliger à moudre le grain
2) Les tuer un par un et les fumer. Beaucoup de sang.
3) Me mettre à crier, à pleurer et leur faire si peur qu'ils partent.

Des fois je cours aussi dans le cercle et je finis par avoir mal au coeur et je sors. Ça me fatigue.

Je regarde donc devant moi et je vois la plaine. Le cercle d'homme nu a disparu et je n'entends que le bruissement du vent dans l'herbage. Des fois, une peine vient me lacérer l'âme, mais rapidement, je respire et je sais que ma maison est derrière moi. Pignon, fenêtre, porte. Possiblement L-.M.

jeudi 28 août 2008

Terese regarde ses papiers

Les conclusions de Terese sont claires. Pour l'instant, ses possibilités d'expansion sont réduites. Elle est bien fatiguée, se masse les tempes, a refait ses comptes, ses projections alignées, les colonnes changées de côté...mais rien n'y fait...
Tant qu'une décision grave et irréversible ne soit prise ou qu'un changement soudain se produise, la situation restera sensiblement la même.
Elle se verse un scotch, flatte mofa et le repousse. De son bureau, elle contemple son empire, l'île, et soupire. Un soupir sans grande émotion, mais plutôt de fatigue.

jeudi 21 août 2008

Grimpant, en-dedans

L'arbre pousse dans le puits que je suis.
Il sinue, lierre.
Il tend, if.
Il rugue, chêne.
Les feuilles sont épaisses, d'un vert sombre.
Parfois même, il chante. Doucement. Humblement.
Les lèvres closes.

vendredi 11 juillet 2008

L'ogre du fond de la cave

L'ogre dort, il ronfle. D'autres silhouettes endormies bougent au gré de leur respiration.
Muhammad de son bâton le touche et lui pose des questions. Qui es-tu, que fais-tu? que veux-tu? Et l'ogre se retourne dans son sommeil, grommelle, manifeste son mécontentement et retourne à son sommeil.

On a bien peur du réveil de l'ogre. Est-ce vraiment judicieux que de réveiller un danger qui sommeille afin de savoir s'il est véritablement endormi et s'il est bénin?

Cette nuit, l'ogre s'est réveillé parce que Muhammad n'a pas cessé de l'asticoter de son bâton. Il s'est levé ensommeillé et s'est mis à hurler en se tapant la poitrine. Qui ose troubler mon sommeil? Puis tous ont eu une peur bleue et l'ogre fatigué s'est rendormi.

Et depuis l'ogre dort, mais d'un sommeil plus léger. Espérons qu'il reste bien endormi. Pour cela, Muhammad devrait bien se tenir et aller questionner d'autres gens qui ont de meilleures choses à livrer.

vendredi 6 juin 2008

Muhammad Douth en convalescence

Il était dans sa cellule depuis plusieurs mois. Parfois, il sortait avec sa canne nouvellement acquise sur la grève de l'île. On l'avait condamné à de menus travaux de jardinage, mais c'était sans penser qu'il n'y voyait rien. Il était dans ses pensées et la rage qui l'habitait s'était estompée au profit d'une grande peine calme, mais lancinante. Il pleurait souvent, en silence. Il se sentait, d'une certaine manière, apaisé.

Ce qui lui faisait du bien, c'est de saluer les gens et que parfois quelqu'un le prenne par le coude pour le remettre sur le bon chemin, pour lui éviter de se fracasser sur les nouvelles parois vitrées de la cathédrale. Il y avait aussi Brahma Ménard avec qui il parlait souvent. Ça l'ennuyait un peu, car il sentait que B.M. lui accordait ce temps par pitié, d'une part et par surveillance de l'autre. Rien de pire que la commisération. Mais enfin, Muhammad pouvait saisir la part de bien dans les gens et s'y tenir. C'était un peu nouveau puisque sa rage prenait auparavant la majeure partie de son espace. Il savait aussi que les îlois allaient lui offrir un chien pour mieux voir et pour lui tenir compagnie. C'était un espoir qui nourrissait son attente.

Il s'était détendu et se sentait moins enclin à faire douter les autres et lui-même: il voyait plus clairement en lui.

Princesse amour junkie

Encore à plat.
Princesse Amour file au rouet avec son nécessaire à crack sur la table basse. Depuis quelques semaines, elle s'est perdu dans les méandres de ses rêves, attendant le prince charmant, le voulant, le souhaitant, le créant même. Il y a bien ce Duc de l'Orignal qu'elle voit depuis un temps, mais Princesse Amour est possédée de son idéal et de ses plans. Princesse Amour cherche son idéal plus qu'une personne et les personnes, les vraies, ça leur fout les jetons.

Elle s'est mise à déprimer, à consommer, à se perdre dans son château, sur la grève et dans sa tête. C'est qu'elle est seule depuis longtemps...et que les déceptions, les amertumes, les rêves bafoués l'ont affaiblie.

Mais qui arrêtera la Princesse, qui lui fera entendre raison, qui réussira à la mettre dans la voie juste? Enfin, déjà elle va mieux, à force de s'intoxiquer et de vivre dans la radioactivité de la pensée, elle s'est un peu tannée elle-même.

Elle regarde par la fenêtre et voit son reflet défait dans la vitre. Quelle genre de Princesse suis-je? La mine tirée, les cheveux ébouriffés, l'honneur battant pavillon bas...
Elle fixa le lointain et la mer longuement, puis revint dans son alcôve et regarda son métier à tisser. D'une main, elle tint le fuseau et de l'autre y planta son pouce et le retira. Vermeil le sang coula sur son doigt, son avant-bras et macula graduellement le lin qui la recouvrait.

La douleur et la vue de son réal sang la ressaisirent .
Il fallait tout d'abord faire le ménage de sa chambre, ensuite mettre en ordre le château. Par après, elle irait rencontrer Terese Von Wartburg pour lui demander la procédure pour devenir officiellement Reine de l'île et exercer constitutionnellement un position honorifique.

Des fois, c'est tellement plus utile de se blesser soi-même que d'en laisser le soin aux autres.
Parole sante.

lundi 12 mai 2008

Princesse Amour se dévoile

Dans un lin blanc et immaculé, princesse amour déambule sur les contreforts de l'île. Cheveux au vent, lin battant, le regard se porte vers l'horizon. Ses seins amples garnissent son corsage et la peau fine et pleine accueille la brise avec humidité. Princesse Amour se dévoile et éclot comme le liseron au soir, dévoilant ses parfums et ses charmes manifestes. D'où sort ce printemps impromptu, céleste et accueillant? Comment surgit cette fontaine de glaire et de volupté? D'où viennent les oiseaux forts de leur chant et antiques en leur procédure?

Les îlois ne tarissent pas du regard de cette fleur éclose et sans pareil. Bonheur de faire et de surgir, amour immense et puissant, telles les trompettes de Jéricho, les cistres grinçants et les buccins marins. Tels les doubles choeurs vénitiens hystériques et chatoyants. Chantez peuple céleste car la Princesse Amour désire de tout son saoul et surgissent les possibles matérialisables.

Connaissez-vous! Humez votre être! Car le torrent, la fièvre et les vaches hystériques ne sauront arrêter leur marche!

mercredi 30 avril 2008

Muhammad interrogé

Dans le sous-sol de la Chapelle, Terese et Brahma sont assis derrière une table. Devant eux se dresse une lumière vive qui aveugle le prisonnier ligoté à sa chaise. C'est Muhammad Douth, le terroriste qui est ainsi séquestré. Son lance-missile portatif à côté de lui. Terese porte les bottes de cavalière de suède beige et tient sa cravache à la main.

Muhammad porte les lunettes fumées et un turban blanc un peu mal fait; blanc, sans être immaculé. Sa colère irradie tels des charbons rougeoyants. On ne voit pas ses yeux derrière ses lunettes, mais on sent bien que son regard perce le verre et les âmes.

À l'arrière Princesse Amour recopie les entretiens et doit donner les premiers soins si jamais Terese cravachait trop fort. En voici le transcript:

T: Qui êtes-vous?
M: Je suis l'envoyé de l'Unique.
B: Qu'êtes-vous venus faire ici?
M: Chercher le vrai, purifier!

Terese vient pour le cravacher, mais Brahma lui fait un bref signe de tête exprimant la négative.

B: D'où venez-vous?
M: (Le prévenu semble déstabilisé) Euh, de loin.
B: Mais de où précisément.
M: (Il semble égaré) Je ne sais plus. Ça fait bien longtemps que je suis parti d'où je viens...
B: Depuis combien de temps?
M: (Son égarement perdure). Je ne sais plus, longtemps. J'ai perdu le fil au cours du temps.
B: Alors, si je comprends bien vous êtes partis il y a longtemps d'un endroit lointain avec comme mission de chercher le vrai.
M: Oui, c'est cela!
B: Qui vous a donné cette mission?
M: Je ne sais plus, ma communauté, moi-même, des gens influents.
B: Vous vous êtes mis en quête pour trouver le vrai?
M: Oui!
B: Et qu'est-il arrivé ensuite?
M: Je ne sais plus, j'ai marché longuement. Et je cherchais le vrai, puis je ne le trouvais pas et je poursuivais ma route. Je me suis fatigué à force de le chercher. Ensuite, je me suis mis à douter: vais-je le trouver, où est-il, vais-je être capable de le trouver? Et je suis devenu triste parce que j'étais seul dans ma quête, et là je me suis perdu, je ne trouvais plus mon chemin et la seule possibilité était de continuer à aller en avant. Mais mes questions m'ont suivi et je suis devenu très fâché. Et puis, j'ai rencontré ce fourbe chinois et nous avons pris un navire ensemble, vous nous avez capturé et je suis ici.
T: Voulez-vous nous détruire
M: OUI! Je n'ai malheureusement plus de missile dans mon lance-missile alors j'utilise mon verbe en instillant le doute en vous en vue de vous faire exploser du dedans!
(Bruit de cravache)
B: Mais qu'y gagnerez-vous?
M: (Il soupire) Et bien, je pourrais peut-être me débarrasser de mon propre doute, de ma colère, de ma tristesse.
B: Pensez-vous?
M: Non.
B: De quoi avez-vous besoin? (Terese soupire)
M: Moi?
B: Oui, vous?
M; Sans doute, de repos, du même endroit pendant un temps, de voir la mer, d'enlever mon turban et de faire guérir mes yeux.
(Il ôta ses lunettes et derrière on vit des yeux voilés, aveugles)
Vous voyez, je ne vois plus. Je ne sais plus trouver ce qui est vrai. Il ne me reste que mes questions.
(Des yeux opaques jaillissent des larmes. Il baisse la tête).

Tous restèrent silencieux, tristes et dépités.


La princesse, Terese et Brahma chuchotèrent ensemble pendant un moment. Et puis Terese prit la parole, Brahma se tenant à côté d'elle:

Voici notre verdict: nous allons confisquer votre lance-missile, nous vous logerons au frais des îliens contre de menus travaux de jardinage, vous aurez une chambre qui donne sur la mer et vous serez interdit de question pour les 6 prochains mois. En échange de cela, nous vous fournirons un chien pour vous guider et nous tenterons de guérir votre cécité. Sinon, nous vous jetterons à la mer après vous avoir cravacher de tout mon saoul.
Elle asséna un violent coup sur la table faisant voler en éclat l'ampoule qui illuminait la scène. Elle tourna les talons et quitta la salle avec furie.

M: Elle est souvent comme ça?
B: Souvent.

dimanche 27 avril 2008

Terese travaille

Ils est bien passé minuit et Terese enlève d'une nonchalance précise ses escarpins en daim . Elle ouvre la carafe remplie de whisky et s'en verse un verre. Il se fait tard: deux glaces. Le bureau de Terese est situé dans le clocher de la Chapelle. Elle a ainsi une vue d'ensemble sur l'île et peut regarder les agissements de tout un chacun. Tutti dormono, se dit-elle. Mofa son gros chat angora blanc s'amène et se frotte sur ses pieds libérés. "Débarasse, sale crotte" lui crit-elle en l'envoyant valser à l'autre bout de la pièce. Le chat se tourne et feule les poils hérissés. Terese feule back et sourit à l'animal furieux. "Merci, Mofa, tu me rappelles qu'il est toujours mieux de choisir ses ennemis et de les garder bien à la vue!"

Terese trime dur depuis quelques temps. Elle a déployé de grands papiers remplis de dessins sur son bureau en acajou. Elle étudie des plans, pense, aligne des chiffres et rêve. Terese, malgré sa sévérité est une rêveuse ambitieuse et réaliste. Quand elle rêve, elle flatte Mofa et les deux sont en bonne entente. Le chat ronronne d'aise et oublie les violences de sa patronne.

En fait Terese cherche à capitaliser, à bâtir de la richesse et à créer de l'espace. À long terme, elle veut créer des projets ambitieux ET rentables. Elle y arrivera. Aucun doute. Elle est armée de son intelligence, de ses stratégies et d'une bonne dose de charme et de puissance.

Elle ne sait toujours pas quel sera son nouveau projet. Elle n'est pas pressée: quand il sera mur, elle mettra les rouages en action; pour le moment, elle songe.

Capitaine Ponton répare le Brisbane II

La trappe de la cale est ouverte et en sort un tintamarre de ferraille et de juron. Le capitaine Ponton répare le moteur du Brisbane II qui est en panne depuis quelques semaines. C'est à force d'affronter la haute mer que le moteur s'est fatigué, que des pièces se sont érodées et que les engrenages se sont enrayés. C'est long réparer un moteur: il faut analyser, trouver le problème, le nommer, trouver la façon de le réparer, trouver les pièces de remplacement et les poser. Ensuite, on décide de l'itinéraire et on repart.

Je suis assis à côté du Capitaine Ponton sur le pont et je suis un peu découragé. "Ça avance?" dis-je. "Ça avance" répond-il.
Je soupire.
"Écoute, il fait beau, tu es avec Louis-Michel, le chalet est joli, le quai est accueillant, profites-en! Je vais finir par réparer le moteur et ça ne donne rien de s'en inquiéter...ça ne le réparera pas plus..."

"Je n'aurais pas dû rester en haute mer aussi longtemps", me lamentai-je. "Peut-être, mais rappelle-toi tous les bijoux, les coffres, les pierres précieuses que nous avons pêchés, ce n'est pas rien! Il faut que tu ailles parfois ouvrir la remise pour t'en rappeler et t'en satisfaire. Et puis tout cela est une question d'équilibre: un peu de haute mer, de caraïbes, de lagune, de canaux intérieurs."

Et puis, il repartit pour poursuivre sa réparation. À un moment, je l'entendis pousser un hurlement de satisfaction. Il ressortit de la cale avec une pièce tordue, une souris morte et un sourire.

Journ'île, Édition du dimanche 27 avril: Girouette

Aujourd'hui nous avons assisté au dernier orage de poulet: Satan, Terese et Gontran avait mis en application la directive secrète C-31 du Conseil de l'île à l'effet de poser des broches sur les toits de la Chapelle et de la Cathédrale. Lors du début de l'orage, les effets de la directive furent instantanés: les poulets tombant du ciel se sont immédiatement empalés sur les broches protégeant les toits de nos institutions et nous munissant de très jolies girouettes pour montrer la direction du vent. Bravo!

lundi 21 avril 2008

L'achèvement de la cathédrale

Pendant quelques semaines les habitants de l'île se relayèrent pour défaire la façade de la cathédrale. Pierre par pierre, ils évidèrent la paroi pour ne laisser que les pilastres porteurs. Gontran supervisait les travaux et avait troqué le heaume pour le casque de construction blanc. Vers midi, le vitrier vint et on combla les espaces créés par des vitres sans couleur. L'effet était spectaculaire: le soleil pénétrait dans l'antre gigantesque et éclairait chaque détails de la construction. La lumière de l'astre avait également eu pour effet d'assécher l'espace et de faire disparaître l'odeur de moisi qui fleurait subtile dans le lieu.

Gontran fit ensuite installer une grande scène surélevée qui occupait toute l'entrée de la cathédrale. Elle devait servir à créer des passions et des spectacles épiques. Il était fort aise.

Lorsque les ouvriers finirent de l'installer, ils sortirent de la cathédrale pour entrer chez eux. C'est à ce moment que Satan Brossard revenait de sa promenade d'après-midi où il partait en forêt pour faire peur aux animaux. Il fut intrigué par la sortie de ceux-ci et curieux de voir les nouveaux aménagements faits à la cathédrale.

Il entra et vit la scène majestueuse se déployer devant ses yeux. Les autres habitants de l'île étaient réunis pour contempler l'aspect de leur nouvel espace et les effets de leurs efforts concertés. Ils étaient souriants et satisfaits de voir le lieu s'alléger et s'illuminer. Bien qu'ils fussent ébahis par l'espace, c'est la surprenante réaction de Satan qui les étonna encore davantage: il était figé , interrompu, les yeux injectés de sang et le souffle coupé. Ensuite, tout se passa très vite: il se mit à avancer d'un pas furieux, en une droite d'un rectiligne parfait, monta sur la scène, se plaça en plein centre, ouvrit grand les bras vers le ciel. De son bas-ventre, on entendit sourdre un appel qui remonta vers sa gorge pour faire exploser ses lèvres et rejaillir dans toutes les langues de la terre disant: "je me meus, j'émeus, je suis verbe". Puis sa petite carcasse dure et rouge se transforma en guépard qui en courant vite se transforma en aigle pour se mettre à voler dans un vrombissement de cri strident emplissant l'espace de son et de mouvement et ensuite, dramatiquement faire un piqué et s'écraser sur scène pour retrouver sa forme originale, évanoui.

Tous étaient médusés du spectacle. Tous sauf Terese, qui opéra un demi-tour pour faire face à ses compatriotes et dit: "Sachez maintenant que Satan est un homme de Théâtre". Elle releva un peu plus la tête et continua" C'était à prévoir". Elle fit de nouveau demi-tour et quitta, faisant retentir ses pas sur le marbre indifférent et luisant.

jeudi 17 avril 2008

Un polaroid

Satan se promène sur l'île. Il regarde ce qui l'entoure, fait peur aux oiseaux, salue les passants, regarde les détails dans la Chapelle. Des fois, il prend des poses et joue un personnage. Il se raconte des histoires et les habite. Il aimerait bien voyager et visiter de nouveaux lieux. Il met des fois son débardeur bleu pour se pratiquer à parler, il l'ajuste dans un miroir et regarde quel air ça lui fait. Je ne sais pas s'il s'ennuie, mais il cherche quelque chose à faire. Satan est beaucoup plus heureux depuis quelques années, il s'émancipe et prend de l'aise. Étonnement, les gens l'aiment beaucoup, parce qu'il est entier et drôle.

La princesse a un peu engraissé et s'ennuie officiellement. Elle n'a pas trouvé le souverain de son coeur, quelqu'un avec qui faire des enfants, quelqu'un à aimer, une voie dans laquelle s'inscrire. Elle se demande si Gontran le chevalier pourrait être sa moitié, mais rien ne surgit.

Terese s'occupe des comptes et ne se soucit pas trop. Elle attend le moment propice pour capitaliser et investir, mais aucun investisseur ne s'est encore présenté. Elle est patiente et attentive.

Jean courtemanche se donne pleinement aux modèles miniatures, sous l'oeil bienveillant et indifférent de son épouse Réjeanne.

Louis-Michel se lime les ongles et écrit sa biographie. Il s'est acheté un ensemble Prada en lin et le regarde plusieurs fois par jour.

Adrianna Gourd a des gaz. Elle n'est pas trop en forme ces derniers temps et prend des médicaments naturels, surnaturels et pharmaceutiques.

Brahma Ménard médite et doute des ses convictions: l'ordinaire, quoi.

Et moi? Moi, je me questionne et je me demande quelle direction prendre. J'arrive à trouver les questions intéressantes, des fois encombrantes, toujours trop présentes. C'est fou comme on se répète. Nous sommes des répétitions variées d'une même histoire. Bien que ce soit la même histoire, on la trouve intéressante et effrayante.

lundi 14 avril 2008

Journ'île, Édition du Lundi 14 avril: Immigrants néfastes

Ce fut à grand renfort de force et de brouhahahah que Gontran, notre pieux chevalier a mis la main sur deux immigrants illégaux venus d'un de ces pays étrangers, plein de mauvaises intentions, de gens sournois et voleurs. Il s'appellent Muhammad douth et Kha-seu. Ils ne semblent pas parler la même langue et venir du même pays, mais proviennent de ce bateau fantôme qui erraient proche de notre littoral. Ils ont été enfermés dans le sous-sol de la chapelle dans deux armoires à balai séparées. Ils sont sous observation. Terese VW les interrogera demain.

Missive de Jean Courtemanche

À: Madame Terese Von Wartburg, présidente du C.A.
De: Jean Courtemanche, ministre sortant du développement

Chère Madame,

La présente est pour vous informer de ma démission en tant que ministre du développement. J'ai constaté lors des derniers mois, une fatigue continuelle et un manque d'envie pour ma position. Je crois que dû à mon âge et mes réalisations (une chapelle et une cathédrale pour notre île), je peux me retirer content. Je suis très fier de ces réalisations et du dynamisme que j'ai pu créer dans notre communauté. Par contre, il est temps pour l'île de connaître d'autres moteurs et que les habitants se solidarisent autour de projets plus proches d'eux. Je sais que vous avez déjà commencé le réaménagement de la façade sud de la cathédrale pour en faire une paroi vitrée: je crois que c'est un bon projet et je vous donne ma bénédiction. Il serait intéressant que l'île se dote de différentes installations (un aqueduc, un théâtre, des maisons et une école) afin que les constructions religieuses soient mieux intégrer dans le paysage.

Je suis fatigué et ai besoin de repos. Je prendrai donc une pause de notre sénat (bien méritée) pour me ressourcer. Je compte faire des modèles à coller et de la peinture à numéro d'ici les prochains mois. Je laisse à vos bons soins les institutions que j'ai construites et serai de retour parmi vous d'ici quelque temps, quand je me serai bien reposé. Alors, je me proposerai comme ministre du loisir et du jovialisme, dans lequel, j'excellerai.

Salutations à tous,

Jean Courtemanche

Jean Courtemanche prend sa retraite

Ce matin Jean se leva, s'assit dans son fauteuil et se sentait déprimé comme depuis un bout de temps. Il changeait les postes de la télévision et s'ennuyait ferme. Il ne cessait de ressasser les évènements des derniers mois et ne réussissait pas à retrouver le goût du travail. Malgré les nombreuses séances de toilettes chimiques confessionales, il ne pouvait songer à son travail sans amertume et avec ressentiment.

Par contre, il trouvait le temps bien long dans sa maison avec Réjeanne qui tournait autour et faisait force ménage. Puis une annonce de planification financière avec en arrière-plan une des constructions qu'il avait réalisée vantaient les mérites de la planification de la retraite. Ses yeux s'ouvrirent grand et il cria très fort:
"Eille Réjeanne! Je vais prendre ma retraite"
Réjeanne arriva en essuyant les restes de pâte à tarte sur le tablier:
"Ah! Oui? Qu'est-ce que tu vas faire?"
Des modèles à coller, m'occuper de mes petits enfants, prendre des marches et tondre le gazon. De la chaloupe aussi.

lundi 31 mars 2008

Satan s'ennuie

Je ne l'avais jamais vu comme ça: morose, fâché mais peu bavard, seul dans son coin donnant des coups de pied aux roches pour les faire valser. Le plus étrange, c'est qu'il ne parle pas.

Je le pris par la main et nous partîmes en promenade. Il restait silencieux, le regard fixe vers l'avant. Tout d'un coup un merle vint se poser sur le chemin et chanta. Satan resta pétrifié devant la scène et se mit à pleurer. Il s'assit par terre et trépigna hurlant: je m'ennuie de mon poulet.

Voilà: Satan s'ennuie de son poulet. Même s'il s'est amusé à courir après le Tétras lapon, ce n'est jamais aussi amusant que de se cacher pour faire envoler le poulet et le faire caqueter à tout rompre.
Je le pris dans mes bras pour le retour et après avoir longuement pleuré, il s'endormit en sanglotant. Pauvre Satan.

dimanche 30 mars 2008

Terese scrute

Elle avait convoqué tous les habitants de l'île à sa réunion. Terese les attendait dans le milieu de la cathédrale avec un casque de construction sur la tête, mais habillée d'une jupe de suède et de ses bottes assorties. C'était en tant que présidente tournante qu'elle avait organisée cette réunion/groupe de travail/ commission d'enquête sur la cathédrale. Tous y étaient allés à contrecoeur. Tout le monde savait bien que la construction traînait en longueur et que l'essoufflement s'était mis de la partie. Jean Courtemanche ne s'était pas présenté à la réunion se sentant encore un peu déprimé et trop pris par le sujet. Il préférait entendre le verdict après la plénière.
Elle fit dresser une table au coeur du transept et s'assit au centre de la table. Elle disposa ses papiers devant elle et mis ses lunettes de lecture. Voici un extrait de son allocution:

"Chers amis,
Je me questionne sur la présence de cette cathédrale en notre île et j'essaie de comprendre quel est son problème. Notre constructeur est en burn out et le flou semble nimber ce projet. Je sais que tous taisent une partie des sentiments qu'ils ressentent face à cette bâtisse. Un silence épais et tacite règne parmi nous et je crains que cette situation n'enlève la vivacité à notre communauté.

Je commencerai par m'exprimer au sujet de cette cathédrale. Lorsque que je suis arrivé cette année au sein de l'île, je me suis dit en arrivant en bateau que c'était une construction bien énorme pour une si petite île. Majestueuse, imposante, forte, mais tout de même disproportionnée. Je me suis dit en moi-même: quelle drôle d'idée d'avoir une chapelle et une cathédrale sur une même île. Je me demande parfois à quoi elle sert: nous n'y allons jamais car son intérieur est lugubre et froid et nous avons déjà notre église pour nous-mêmes. En plus, personne ici n'est religieux et nous n'avons pas de ministre et n'en voulons pas. Les touristes sont rares (5 par jours!): elle ne sert finalement que très peu et à peu de gens.

L'autre problème est qu'elle nous apparaisse difficilement. Puisqu'il y fait si sombre, il est difficile d'y voir à l'intérieur. Et c'est aussi vrai pour l'extérieur! Elle est si haute et près de la chapelle qu'on ne peut s'imaginer son ampleur véritable. Je défie quiconque de la bien dessiner!

Je sais que Brahma et la princesse la trouvent impersonnelle, que Satan la trouve froide, que Gontran en est fier, que Jean ne sait plus comment s'y lier. Il y a bien Adrianna Gourd qui la trouve majestueuse et élevée. Moi, je crois que c'est un symbole appréciable, digne de fierté, mais trop proche de nous."
Tout le monde se regardait les pieds.
Terese repartit de plus belle:

"Personne n'a remarqué que sa construction était terminée. Il y manque toujours des festons, de gargouilles et autres détails architecturaux, mais la cathédrale est. Je constate aussi qu'il n'y a eu aucune cérémonie d'inauguration, que personne ne l'a investi. Alors voici ma question: qu'allons-nous en faire?"

Tous semblaient éluder la question.

"Voici les options: 1)la détruire 2)l'investir 3) la déplacer"

Gontran s'exclama:" Nous devrions faire en sorte que la façade soit en verre, ainsi la lumière entrerait. Le soleil y pénètrerait grandiose!"

Tous se tournèrent vers lui, interloqués et surpris.

"Et on pourrait aussi y donner des pièces de théâtre, des passions, des concerts, des sonneries."

Terese était médusée. "Je t'en charge" lui dit-elle.
Gontran souriait et tous les autres îliens le regardèrent avec admiration et soulagement.

Brahma dit alors: "La meilleure solution serait de la distancier réellement ou que l'on construise d'autres bâtiments afin qu'elle se perde parmi d'autres, mais avant que cela ne se fasse je crois que nous devrions construire un ruisseau pour nous en séparer. Nous pourrions y jeter un ponceau afin qu'il réunisse les deux terres d'église.

Tous se regardèrent et se levèrent bruyamment, contents d'avoir trouvé une solution.

samedi 15 mars 2008

Ménage

Après avoir lancé les assiettes et déchiré le tapis tellement je me sentais mal à l'aise dans ce nouvel espace, j'ai décidé de tout réorganiser le chalet. Exit le vieux tapis orange et les décorations empoussiérées, les miroirs ayant perdu leur tain, les baigneuses bleu poudre languissantes de la salle de bain, les angelots gazés de la chambre des maîtres. Ça tombait bien le bateau vidangeur conduit par le Capitaine X6 passait dans le coin. Il pourra faire toutes sortes de constructions avec mes déchets...tant mieux pour lui. C'est sûr que ça emmerdait Louis-Michel qui voulait se faire rôtir nu sur le pont, mais il trouvait plaisir à observer le Capitaine et ses matelots se mouvoir sur leur rafiot.

Un coup parti le vaisseau-vidange, le chalet était maintenant vide et poussiéreux. Je fis un grand ménage et tout le pourtour du chalet brillait d'un éclat soyeux tant la poussière envahissait l'espace. Ce fut ainsi deux jours durant et j'entendais les mouettes tousser au-dehors.

Puis, je mis une gros système de son coûteux dans le milieu du salon et j'étendis par terre de la musique en feuille et écoutai les sons soyeux sortant des technologiques parleurs. Je m'entourai d'architectures ailées afin de me faire un dais de feuille et d'arabesques contournées, voyant dans l'espace les structures se déployer et se mouvoir au gré de l'esprit. Pour un instant, j'oubliai mon nom, l'espace et cette pesante matière afin de m'enfuir haut, loin et ailleurs, me mouvant souple et léger. Joyeux.

Alleluia.

lundi 10 mars 2008

Jean Courtemanche confessé

Jean est assis dans son fauteuil depuis plus d'un mois...Réjeanne n'aime pas trop ça, mais ne s'inquiète pas. Jean non plus n'aime pas ça et il triche en allant voir les chantiers, mais toujours déguisé afin que personne ne le remarque. Au moins, il s'amuse à changer de déguisement: une vieille dame, un clown, une mascotte de Baseball mineur, un inspecteur du gouvernement.

Un jour d'une visite travestie sur un chantier d'une Église Baptiste, il regardait l'avancée des travaux en travers de la clôture. Il constatait satisfait l'allure de la bâtisse et le rythme des employés. Soudain, il entend quelqu'un s'éclaircir la gorge derrière lui. Il se retourne surpris et voit le prêtre baptiste, évangile en main, le regarder.

Prêtre: Vous avez besoin de vous confesser, mon frère.
Jean Courtemanche: Non, non. Merci.
P: Avez-vous vu un point d'interrogation à la fin de ma phrase? Regardez: Vous avez besoin de vous confesser, mon frère.
J: Ah non, c'est bien vrai...il n'y en a pas!
P: Venez vous confesser.

Le prêtre se dirigea vers deux toilettes chimiques bleues, dressées côte à côte. Jean le suivit, hésitant et à une courte distance, dit:
J: Ce ne semble pas être un lieu approprié pour se confesser.
P: Pas plus qu'un habit de clown pour un entrepreneur en construction ecclésiastique.

Il dit cette dernière phrase sans se retourner et en empoignant vigoureusement la porte de la toilette chimique pour s'y engager d'un geste preste. Jean regarda ses souliers courbés de Clown, vue qui était légèrement obstruée par le nez rouge apposé au bout de son propre pif. La dernière remarque l'avait convaincu de la valeur de l'homme de foi.

Il entra dans la cabine de plastique bleue et un portillon s'ouvrit doucement à sa droite.

P:Vous devez conserver vos culottes en tout temps. C'est une installation temporaire.
J: Bien sûr, mon père.
P: Frère, je suis baptiste...
J: Désolé.
P: Dites-moi l'objet de votre trouble.
J: Je ne peux plus m'abandonner à mon travail avec joie et démesure. J'ai peur et je suis triste. Je suis aussi confus.
P: Une chose à la fois...pourquoi êtes-vous confus?
J: J'ai peur que mon amour me mène à la souffrance.
P: L'amour mène à la souffrance, ou du moins partiellement.
J: J'ai peur que la souffrance dépasse l'amour que j'éprouve.
P: Voilà qui est mieux dit. Est-ce arrivé?
J: Non, j'ai arrêté à temps. Mais j'ai souffert.
P:Et vous avez peur de???
J: Me retrouver dans la même situation
P: Alors, il faut faire différemment
J: Je sais, mais je n'ai pas trouvé.
P:Et vous êtes triste de quoi?
J: De ne plus entretenir une relation idéale avec mon travail.
P: Entretenez-vous une relation idéale avec votre femme
J: Réjeanne? Ça fait 35 ans que nous sommes ensemble!
P: Vous l'aimez?
J: oui, beaucoup.
P: Donc vous pouvez aimer votre travail sans avoir une relation idéale avec celui-ci.

Jean reste muet.

P: Je vous souhaite de faire votre travail dans la joie, mais je ne vous souhaite pas la démesure. Dieu préfère la sincérité à la quantité...surtout ces jours-ci!
J: Merci, mon Père.
P: Frère...

P: J'ai d'autres questions. Pourquoi êtes-vous déguisé en clown?
J: Je trouvais ça drôle et j'aime ça que mes employés soient décontenancés. Et en plus, j'aime bien me déguiser en femme...c'est une petit fantasme...j'ai lu dans un livre qu'il fallait exprimer son côté féminin.
P: Je vois.
J: Moi, j'ai une question. Pourquoi confessez-vous les gens sans qu'ils le demandent? Pourquoi travaillez-vous quand votre église n'est pas encore bâtie et pour quelqu'un qui ne fait pas partie de votre communauté? Et même de vous emménagez une confesse-o-jiggs?
P:Parce que c'est ma mission. J'aime aider les gens. Et le monde est mon église.
J: Mais, votre travail, il ne vous fait jamais chier? Oh Pardon, mon Père, eeuuuuhh, Frère.
P: Oui, bien sûr, ma mission est tellement claire que j'en oublie facilement les désagréments. Et puis je les ai aussi balayés avec le temps.
J: Est-ce que ça veut dire que ma mission n'est pas de bâtir de cathédrale? dit-il, d'une voix remplie de crainte et de désespoir
P: Peut-être. Mais je crois surtout que c'est une partie de votre travail qui ne vous appartient pas. Je pense que vous devriez cesser de vous voir comme un employeur ou du moins comme un bon employeur. Votre spécialité est la construction de cathédrale, pas la gestion d'une équipe. Vous devriez avoir quelqu'un pour faire ça. Vous concentrer sur votre véritable talent: créer un lieu où Dieu et les hommes se rencontrent dans la confidence, la joie et la tristesse. Travaillez pour vous!

L'homme d'Église se leva rapidement et sortit de la toilette chimique en expirant bruyamment: il avait fait toute sa confesse sur un seul souffle. Un miracle.

dimanche 9 mars 2008

Le Chalet

J'ai mis en marche le Brisbane II, mais je n'avais pas envie de retourner en haute mer. Je n'avais pas le courage, ni l'envie. J'ai donc commencé à avancer sans destination précise. Puis, j'ai vu sur la côte un chalet suisse qui donnait sur la mer. J'étais intrigué de voir une telle construction ayant pignon sur plage et frayant son chemin à travers les palmiers. Je dirigeai le Brisbane vers le quai qui prolongeait la sortie de la maison telle une langue tirée dans les flots paisibles. J'ammarai et me dirigeai vers l'habitation. Sur la porte, il était écrit " Xerus, entre!". J'étais surpris de me voir ainsi nommé sur la porte de la maison. À l'intérieur, c'était très semblable à la maison à laquelle j'avais rêvé il y a quelques années et où j'avais rencontré Louis-Michel. Il y avait une petite mezzanine dans le salon où il pouvait facilement dormir et de nombreuses fenêtres pour regarder à l'extérieur. Aussi du bois, partout. Je retournai au Brisbane et réveillai Louis-Michel. J'entrepris de lui faire visiter le chalet suisse et il était d'accord pour dire que les deux maisons se ressemblaient.

"C'est comme chez nous, mais dans le Sud."

Puis, je lui demandai s'il était plus sage de demeurer au chalet et d'utiliser le Brisbane pour des voyages ou de vivre dans le Brisbane et d'utiliser le chalet pour se reposer.

Voici ce qu'il me répondit:
"Je n'aime pas le mot sage dans ta question" et "Je crois qu'il est beaucoup trop tôt pour répondre à cette question".

Mmmmmm, Répondis-je.

Il prit une serviette et s'étendit nu sur le quai. Entre Brisbane et terre.

mardi 4 mars 2008

à l'ancre, à l'encre

Le Brisbane II est à l'ancre. J'ai décidé de rester un peu au même endroit. J'adore voir la côte, ça fait en sorte que je n'ai pas peur. Je sens que je peux partir le moteur et me rendre au bord. En plus, du pont je peux voir les palmiers étendre leur bras dans le vent. Certains matins lorsque le vent est favorable, je peux même sentir les parfums musqués et exotiques de la terre s'élancer comme des fous dans l'air du large. Alors, je les hume au vol et je peux rêver de leur provenance. L'autre avantage de rester à l'ancre près la côte, c'est que les poissons sortent déjà grillés de l'océan. Tu pêches et hop! tu sors un filet bien grillé. J'avoue ne pas trop comprendre, mais comme toute chose bonne et mystérieuse, je les accepte sans poser de questions. Il y a aussi ces bancs de souris nageantes. Elles nagent par groupe de 10 à 15 et semblent dirigées par un chef autoritaire. Elles ont chacun un flotteur et nagent comme des folles sous les imprécations de leur guide, qui somme toute ne semble pas savoir où aller. Décidément, je n'aimerais pas être à leur place.

En dépit de ces anormalités surprenantes, j'aime bien rester dans les eaux saumâtres de la côte. Elles me procurent calme et joie tranquille.

mardi 26 février 2008

Conte Volatil

Je cherchais frénétiquement de mes ongles et de mes mains l'or qui aurait pu se trouver dans la terre. Je grattais anxieusement le sol sans jamais trouver. Mes yeux étaient clos et je ne trouvais pas le contentement. Soudain , j'ai entendu un bruit tout près de moi: c'était un poulet qui faisait son son. Poooooot pooooot. Je me levai la tête et ouvrit les yeux. Un poulet me regardait curieux. Je cessai de gratter la terre pour mieux percevoir l'entrée de l'oiseau dans mon univers.

Étrangement, le poulet semblait attiré par moi, ou, du moins, il ne semblait pas vouloir quitter mon giron. Il se tenait toujours dans les parages et je pouvais entendre à distance variable le frêle son de sa voix. Je me mis à vouloir entendre sa voix car sa présence me faisait gratter la terre à la recherche d'or avec moins d'impatience et d'ardeur. Il me calmait. Le cherchant fréquemment du regard et de l'ouïe, je m'aperçus peu à peu de ce qui m'entourait et vis les arbres, les fontaines, les bancs et les chiens. Toutes choses dans le rayon de mon regard.

Puis, je vis que près de moi le poulet voulait faire son nid, mais il semblait hésiter, me regardant plein de frayeur. Il amenait telle branche, un morceau de ciment, une plume égarée, un glaçon séché, mais quoiqu'il fît les éléments ne semblaient pas savoir s'agencer et il regardait son nid avec désolation. Parfois, même il me jetait un regard suppliant avec un long poooooooot triste ne sachant que faire de son impossible nid. Je lui flattais la tête en me disant qu'il finirait par trouver la forme de son nid, qu'il lui fallait du temps et des essais, mais plus le temps avançait, plus sa détresse augmentait au fil de ses tentatives.

Un matin, il m'adressa un petit pot en guise de conclusion et il partit. Je ne sus trop que faire, car j'avais appris à aimer l'oiseau et ses habitudes: de reconnaître ses trajets, ses goûts, ses peurs et même de l'aider un peu, pour faire de sa vie une existence plus confortable et apaisante. Mais non, il ne pouvait pas faire maintenant son nid, il ne savait plus.

J'ai cru que j'allais recommencer à chercher indéfiniment l'or du bout de mes doigts, mais bizarrement, non. On dirait que ce poulet m'a montré à regarder au-dehors et à chercher des yeux et des oreilles ce qui résonne à l'extérieur de moi.

Par contre, je tends souvent l'oreille pour voir si je n'entendrais pas un petit bruit de poulet dans les aulnes. Quand je ne l'entends pas, je le fais moi-même et ça me console et m'attriste à la fois.

lundi 25 février 2008

Brahma Ménard songe et passe à l'interrogatoire

Brahma se retire souvent dans un garde-robe situé sous l'escalier qui grimpe au jubé de la chapelle. Il a installé son alcôve avec des coussins, du chauffage et une lumière: une ampoule nue que l'on allume en tirant une chaînette rouillée. C'est un recoin sec et boisé qui a tous les aspects d'une matrice proprette. Il y apporte ses livres, ses crayons et peut penser et philosopher à loisir. D'ordinaire, il y reste 2 ou 3 heures pour y produire un sermon. Il l'écrit, l'annote et le pratique même en marmonnant. À la fin de la répétition , il lève les yeux au ciel et soupire. Encore une fois, personne ne l'entendra

Brahma aimerait aider le sort de ses compatriotes, les rendre heureux. Telle est l'énergie de sa pensée: s'aider et aider les autres, en pensant mieux et en vivant mieux. Mais Brahma est frustré, car ses interventions sont mal reçues : il dérange, embête et moralise. Il pense prêcher dans le désert et sent que son énergie s'évapore dans le cosmos, sans résultats. Il ne reçoit que regards circonflexes et pupilles fuyantes comme seul paiement. Pire: les autres l'évitent. Il prêche donc sous l'escalier sans que personne ne l'entende.

D'aucuns croient que Satan Brossard et Brahma Ménard s'opposent et se détestent, chacun défaisant les actions de l'autre...mais c'est faux. Ils vivent des existences parallèles. Brahma est jaloux de Satan car il s'est libéré et fait comme bon lui semble. Il envie et admire cette liberté d'être et d'action que Satan enfourche. Satan, lui, trouve que Brahma manque d'élan, d'agressivité et de bonheur. Ça l'emmerde de se faire dire par Brahma qu'il devrait comprendre tel ou tel emmerdeur.

"Comment ressentir de la compassion pour l'autre tout en se respectant et en agissant de la manière la plus efficace qui soit?"
Telle est le sujet de sermon que Brahma fouille aujourd'hui.
Mais inopinément Satan ouvre la porte de son réduit et s'empare du petit cahierdans lequel tout est noté.

Satan: Moi, j'ai une question pour toi.
Brahma: Je crois que je suis en mesure de me poser mes propres question, Satan.
Satan: Come on, esti. Lâche tes grands airs pis écoute-moi. En plus, si t'étais si spirituellement avancé que ça, tu aurais l'humilité de penser que mes questions sont aussi bonnes les tiennes.

Brahma reste interloqué par la justesse des propos de S.

Brahma: Je t'écoute.
Satan: Qu'est-ce qui te ferait plaisir à toi?
Brahma: Sentir que je fais une différence positive dans la vie des autres, être aimé et apprécié par les autres, être reconnu comme un leader spirituel.
Satan: t'as pas déjà ça?
Brahma: Je fais chier tout le monde avec mes conseils...
Satan: Mais peut-être est-ce le lot de ton espèce: les missionnaires, les prophètes...ils n'ont jamais eu trop la cote...
Brahma: mmmm
Satan: Autre question, quelle serait pour toi une situation idéale?
Brahma: (souriant) Je donnerais des conseils à tous et cela rendrait leur vie plus heureuse, il comprendrait comment penser et cela les aiderait dans leurs actions et leur être.
Satan: J'ai l'impression que tu réussis assez bien ça pour les gens en-dehors de l'île. Je dirais même que tu es reconnu pour ça. Mais peut-être n'est-ce pas ta fonction avec nous?
Brahma: Mais il faut vous empêcher de faire vos plans scabreux! Et puis si je n'intervenais pas, ceux du dehors de l'île en baverait et finalement, on serait tous dans le trouble!
Satan: Tu vois! On fait ce que tu dis, mais on ne le fait tout de même pas de bonne grâce. Tu as donc une influence positive tant sur nous que sur les autres. Et les épargnant, nous et eux. Personne n'a dit que la vertu était facile... Sans tes admonestations la chanteuse hystérique se serait faite écrabouiller et pitcher en bas de la falaise par moi, sans autre forme de procès; le rabin roublard aurait su de quel charbon pourri il se chauffe et j'aurais personnellement détruit une partie de sa synagogue; l'employé névrosé, je l'aurais tout simplement poussé au suicide. Tu vois: la chanteuse chante ailleurs, le rabin est sur d'avoir gagné (est-ce si bien?) et l'employé pleure sous d'autres cieux. Nous sommes en paix. Je ne t'en veux pas, mais j'aurais bien aimé les écrabouiller et je ne ressens pas cette satisfaction qui m'aurait plus à les voir souffrir des mêmes affres dont ils nous ont fait souffrir . Je dois attendre le "sens" comme tu te plais à dire, d'attendre que la vie s'en charge d'elle-même...mais sache que je m'en réjouirai quand la vie leur mordra le mollet profond, profond...

(Satan marque une pause, se râcle la gorge et prend une pose tragique, imitant le drapé d'une toge classique)

Ô mon ami, cesse tes lamentations.
Que tu prêchasses en Gobi, ou en Atacama,
Tel n'est pas le cas
Ta souffrance est dans la carence
Non pas d'audience, mais d'affection.

(Satan fait une courbette de sa toge rouge et s'incline)

Brahma était saisi. Il n'avait pas réussi à comprendre que les autres suivaient ses directions, malgré eux...

Satan: Une autre question: c'est quand la dernière fois que t'as fourré?
Brahma: Voyons Satan, je suis ascète!
Satan: Une autre piste de réflexion: est-ce vraiment en reniant les fruits de la terre que l'on connaît mieux la vie??? Et puis, tu es vieux et poussiéreux. Tu t'habilles comme un prof d'université de région qui enseigne le même cours depuis 23 ans!
Brahma: Voyons, je suis ASCÈTE. Je suis au-delà la matière.
Satan: Pfffffff, arrête-moi ça. Être moche et ennuyant, c'est pas être hors de la matière, mais être pogné dedans.

Puis la princesse passa et Satan remarqua le décolleté seyant qu'elle portait.
Satan: Euhhhh, moi j'ai d'autre chose à poursuivre. Pense à ça...


Brahma voulut rentrer dans son réduit, mais se ravisa et sortit de l'église: le grand air lui ferait du bien.

mercredi 20 février 2008

La nuit tombée, le Brisbane II accoste et un passager quitte

Je voyais la terre approcher depuis quelques jours. Ça faisait très longtemps que j'étais en haute mer. Je le voyais au bout du pont contemplant le lointain. Je savais bien qu'il fallait aller le reporter: il avait trop facilement le mal de mer et c'est quelqu'un qui aime la terre ferme. C'est comme ça, je n'y peux rien.

Nous sommes arrivés au quai la nuit tombée. Je l'ai regardé affectueusement et je lui ai donné un cadeau que longtemps j'avais conservé caché: une grande cage avec un poulet au plumage vert émeraude avec des pointes rousses, une houpette rouge et des yeux jaunes. Le poulet dormait. Déjà, il était sur le quai. Je lui ai tendu la cage et nous nous sommes embrassés. Il m'a souri et il disparut.

J'ai versé une larme et je suis retourné à mon yacht. Sur le volant, j'ai doucement et longuement pleuré. Puis, j'ai mis en marche le moteur et j'ai démarré.

J'en ai marre de la haute mer. Il fait toujours mauvais, il pleut et on s'ennuie. Je vais longer la côte parce qu'on la voit et c'est rassurant. En plus, il y a des quais et sur les quais, il y a des gens. Et peut-être même y a-t-il des gens qui voudront venir faire des tours dans mon yacht? En plus, il est si beau et confortable!

lundi 18 février 2008

Jean Courtemanche devant ses échecs

Dure année pour le pauvre Jean. La construction de chapelles, d'églises et de cathédrales est en pleine croissance et ses mérites de contracteur ont été reconnus en dehors des frontières même de l'île. Le pauvre Jean est fatigué et déçu; fatigué d'avoir tant travaillé, mais aussi déçu de ses employés et de ses clients.

Le problème de Jean Courtemanche, c'est qu'il est trop honnête et trop parfait. Son amour de la construction religieuse (choisir le type de pierre, les volutes, les arcs, les pigments, tout!) et sa passion pour le travail rigoureux sont tels qu'ils le rendent pur et droit. Mais le voilà depuis quelques semaines assis dans son sofa et il regarde d'un air vague son bilan financier et les différents plans des églises construites. Il se rappelle aussi de cette secrétaire fatigante qui se limait les ongles à s'en écourter les doigts, de cet employé névrosé qui un coup le travail accompli détruisait tout avec sa masse en pleurant, de ce rabin roublard tricotant et retricotant ses phrases pour économiser quelques centimes et vous faire sentir comme si vous étiez le pire contracteur religieux du monde (fini les synagogues se dit-il), de cette chanteuse de messe hystérique qui venait s'érailler en plein chantier dérangeant et terrorisant les ouvriers, leur demandant de danser avec leur pelle et de la repeigner avec leur râteaux, et même de son propre père Anselme Courtemanche qui venait se lamenter du passé demandant attention et rétribution.

Décidément, il ne voyait pas trop à quoi ça servait de construire des églises, de faire ce qu'il aime quand tous ceux avec qui il travaille viennent foutre le bordel sur le chantier, retardant les échéances, rendant le travail lourd, enduisant de poix ses nobles ambitions.

Mais ne voyez-vous pas qu'on ne bâtit pas des églises comme des maisons? clamait-il.

(J)ean: Mais i comprennent pas qu'on fait pas une église comme un shack? disait-il à Réjeanne Courtemanche, sa redoutable et efficace épouse.

(R)éjeanne: (lui flattant le crâne dégarni, d'un air distrait et un peu exaspéré) Et pourquoi on ne bâtirait pas une église comme un shack?
J: (soupirant tel un ballon qui se dégonfle) Parce que
R: (toujours exaspérée)Parce que quoi?
J: (enflammé, se redressant soudainement, mais en ayant mal au dos à cause de la soudaineté du geste quoique cachant la douleur par souci d'épargner son honneur devant la redoutable R)Parce qu'une église c'est grand, c'est noble, ça sert à nous rapprocher de ce qu'il y a de meilleur en nous et chaque pierre doit être posée avec cette intention.
R: chéri
J: oui
R: 1) Il y a des gens qui construisent des églises pour d'autres raisons (pour payer leur bills par exemple)
2) Il semble clair que ce ne soit pas tout le monde qui possède le même degré de droiture, de rectitude et la même exigence envers soi-même que toi.
J: (choqué) c'est choquant
R: (résumant) J'en conviens. Maintenant, tu es averti, tu le sais.
J: Oui, mais là j'ai plus envie de travailler, j'suis fatigué, j'suis pas motivé. Qu'est ce que je vas faire?
R: Ben tu vas prendre des petites vacances, j'vas te faire un bain de pied pis du pâté chinois. Pis laisse-moi gérer le monde sur le chantier. Tu vas voir, i vont filer doux. Pis ton rabin, tu me donneras le téléphone, m'a i organisé sa synagogue.
J: (désespéré) Ah maudite synagogue: on avait même pas fini de peinturer les murs, pis la i m'a dit que la peinture était pas de la bonne couleur, pis qu'on aurait dû commencer par le mur du fond, pis qu'a sentait trop fort. Pis i m'a dit de partir. Maudit chien sale. Moi qui avait fait un si beau plan, pis au 3/4 construit.
R: Ben t'as été assez épais mon Jean pour payer la peinture de ta poche "parce que cette marque-là ça faisait plus beau".
J: (larmoyant)Mais ça faisait vraiment plus beau...pis en plus, je me disais que ça m'amènerait d'autre contrat de synagogue.
R: Bon, ça suffit mon Jean...tu commences à me casser les oreilles. Si le rabin rappelle, je vais lui dire de s'étouffer avec ses boudins, la chanteuse hystérique est partie (gravement blessée lors d'un orage de poulet), l'employé névrosé s'est suicidé, ton père est retourné à l'hospice, la maudite folle fatigante de secrétaire, tu l'as déportée pis t'as acheté un afficheur. Yé où le problème?
J: je suis pas motivé, j'ai pas envie de travailler.
R: Parfait, je vais m'occuper du travail en attendant. D'ailleurs, t'as reçu une soumission pour construire une grotte aux miracles dans une cathédrale presbytérienne. Y ont ben de l'argent...
J: enwèye, enwèye, montre-moi ça!


Incorrigible Jean.

jeudi 14 février 2008

Oiseaux blessés

Il n'y a peu de chose aussi triste et démunie qu'un oiseau blessé. Imaginez: si l'on troue son aile, que l'on gomme ses plumes ou que l'on cogne sa tête, l'oiseau ne vole plus ou il vole mal. Il prend son envol et retombe, ne réussit pas à se diriger dans une direction qui lui plaise, ou souffre démuni sur la pelouse ayant pour seul défense son cri désespéré.

Mais aussitôt guéri, l'oiseau retrouve son élan et vole et pépie et se dirige vers le soleil. Rien ne saurait empêcher l'oiseau de narguer la gravité et de créer de nouvelles arabesques dans l'espace infini. Ainsi va sa nature volatile.

Il en va de même pour chacun de nous, car en nous réside un oiseau. Prenons par exemple le poulet: bien qu'il ne vole plus, qu'il n'en soit plus capable, dès que le malheur s'abat sur lui, il ne chante plus. Enlevez-lui l'épine de l'ergot et encore dès potron-jaquet, il n'aura de cesse de chanter...En définitive, il s'agit de se coucher tôt et de savoir ôter l'épine de l'ergot, car il est plus agréable d'entendre le coq chanter que d'avoir affaire à un poulet déprimé...je vous en passe un papier.

lundi 11 février 2008

Un party sur le Brisbane II

C'était fête hier soir sur le pont du Brisbane II. Terese avait préparé une longue table avec des victuailles coûteuses provenant des quatre coins du monde et elle officiait telle une reine expliquant la provenance de chacun des éléments. Jean Courtemanche était en vacances et bien content de l'être: son entreprise de construction de cathédrales, églises et chapelles a connu dans les dernières années une expansion sans précédents et la situation fut difficile à gérer. Il avait pour l'occasion déserré sa cravate. Satan fit bien péter un pétard suscitant la surprise et l'hilarité générale. Il disparut aussi un bon moment avec les deux "gerda" ramassées aux Barbades. Elles revinrent les joues rouges et Satan, l'oeil brillant.

Les lumignons brillaient sur le pont et de jolis reflets enserraient le yacht. Les poissons se pressaient autour de l'embarcation pour voir la joie des convives.

dimanche 3 février 2008

La tombe du roi

Un cerisier a poussé. Le tronc est lisse et foncé, les feuilles sont d'un vert sombre et luisant et d'incalculables cerises rouges et brillantes pendent aux rameaux. Des oiseaux virevoltent et s'en empiffrent. Il a été inhumé entre la cathédrale et la chapelle et les habitants de l'île y ont placé un banc afin de se recueillir et de profiter de l'ombre de l'arbre.

samedi 2 février 2008

Le Brisbane II

C'est fait: je me suis acheté un yacht. J'ai échangé ma vieille chaloupe à rame contre un yacht dernier cri avec cinéma maison, cuisine intégrée, salle de muscu, pont pour se faire griller, toute la patente, quoi. Il y a même des whippers pour balayer l'écûme qui se forme les jours de grand vent.
C'est super: je vais pouvoir aller faire des tours en mer avec Satan et Terese et aussi avec tous mes amis. Quand il fera pas beau, on va pouvoir faire des gros partys dans les étages inférieurs. C'est cool, non?

C'est le Brisbane II. Il est beige métallique avec des bordures noires. Il bat pavillon maltais. Pour l'instant, on est dans l'atlantique et il ne fait pas super beau. Hier, mon intendant a pêché un collier avec des pierres précieuses dans la mer. J'étais plutôt impressionné. Je me dis tout de même qu'un tour dans les Caraïbes, ça ne serait pas mal du tout...Je pourrais accoster dans une île et une troupe de filles à gros seins (Avis à toutes: je n'ai aucun problème avec les seins refaits, je ne fais aucune discrimination) pourrait embarquer et on boirait des cocktails.

Si ça arrive pas c'est pas grave, mais ça ne serait sûrement pas désagréable...

jeudi 31 janvier 2008

Un enfer personnalisé

Ça fait longtemps que j'y pensais: m'acheter un lopin de terre en enfer. Savez-vous qui j'y mettrais? Sûrement plein de gens. Mais ce serait plutôt un enfer à sécurité minimum. Juste pour les cons. Je laisse les meurtriers et les pédophiles aux autres. Juste les épais, ceux qui prennent toute la place à la machine à photocopier, qui passent en avant des autres en file, qui traversent à la lumière rouge, les gens pour qui tu te fends en 4 et qui te lâche à la dernière minute, ceux qui te font subir leur névrose, les pas fiables et les manipulateurs. Les osties de cons, quoi.

Ce serait un gros trou avec de la bouette dedans et un feu où brûle un pneu. Il y aurait des vieux labradors qui puent des oreilles, de l'haleine et qui pètent à qui mieux mieux. Une sélection musicale alternant Mario Pelchat, Webern, Gabriel des3maisons et Radio Classique Montréal (les meilleures annonces en rafale!) distillerait son venin. On plucherait des patates et on repasserait des chemises sales à longueur de journée.

Et puis, Satan Brossard pourrait utiliser sa créativité pour développer de nouveaux sévices toujours plus raffinés et sournois. Bien adaptés à la personnalité de chacun des damnés.

Ahhhhh! Oui, ça me libérerait!

mardi 29 janvier 2008

Un orage de poulets

Personne ne s'y attendait: il s'est mis à pleuvoir des poulets sur l'île... Une chose bien surprenante et inconvenante: les poulets tombent du ciel et saccagent tout sur leur passage. Même le toit de la chapelle est tout bossé; Adrianna Gourd en a même reçu un sur la tête, le bec lui est entré dans le cuir chevelu et ça c'est un peu infecté. C'est déjà le troisième orage de poulets cette année et les gens de l'île commencent à en avoir marre. Ça fait toujours la même chose: le ciel se couvre très rapidement et ensuite les poulets tombent. Ça dure quelques jours et puis ils disparaissent comme par enchantement, mais ça laisse des traces et les habitants de l'île craignent le retour de l'orage; devoir reconstruire, solidifier et sans garantie contre la prochaine intempérie.

Pourquoi pleut-il des poulets??? Mmm. Bonne question. Les poulets volent en groupe, puis à un certain moment, il y en a un qui a une idée et il dévie de sa course et puis cogne un autre poulet qui a une autre idée et puis tous les poulets s'entrechoquent et tombent. Mais les poulets savent bien que les gens de l'île sont pacifiques et patients, sinon ça fait longtemps qu'ils voleraient mieux en groupe ou encore qu'ils s'écraseraient sur une autre île.

Et si j'étais un poulet, moi je ferais bien attention, car les habitants de l'île ont bien envie d'une bonne grosse batch de coq au vin, faite en famille...les congélateurs sont vides.

Pot pot pot!

dimanche 27 janvier 2008

Satan dis JE

Satan se lève et regarde. Il cherche ce qui va attiser son désir. Tel beau garçon à la structure charpentée, frêle ou robuste; telle femme à la poitrine voluptueuse, à la croupe facile à attraper pour mieux pénétrer et faire jouir. Adolescents, adolescentes, femmes mûres, jeunes mères, artiste malingre, homme fort et fluet, il s'agit d'un détail, un rien pour attiser sa convoitise.

Satan brille des yeux et se dirige, fend.

"Viens que je prenne possession de ton corps et de ton âme, pour que haut et fort, tu cries JE dans une agonie de plaisir et de douleur qui te confirme. Laisse-moi te faire être plus. Salope."

Voici le chant de Satan. Satan Brossard bien évidemment.

jeudi 24 janvier 2008

La mort du roi

En fait...personne n'avait su comprendre assez tôt. Tous les habitants de l'île s'étaient réunis dans la petite chapelle autour du roi qui gisait sur l'autel. Personne ne savait que faire de ce monarque possédé du mal. Ils avaient convenu que le meilleur traitement eût été un exorcisme, mais personne de l'île n'était habileté à le faire. Aucun prêtre n'y habitait (bien que l'île possédât une chapelle, un presbytère flou et une cathédrale en construction) et n'y officiait. Personne ne désirait non plus la venue d'un ecclésiastique dans l'île, trop heureux et fiers de leur indépendance d'esprit. Chacun y alla de son mot sur le roi.

Terese Von Wartburg: Il n'a su accomplir toute sa richesse et sa grandeur.

Satan Brossard (qu'on avait couvert, tel un spectre de pacotille, d'un voile blanc pour pénétrer dans la chapelle) : C'était un homme bon, injustement possédé par le mal.

Gontran, chevalier: C'était mon roi.

Princesse: (à part elle) Il m'avait été promis...

Jean Courtemanche, entrepreneur: Tant de projets, et sans descendance. Je suis triste pour le roi.

Ils se regardèrent tous dans les bancs de la Chapelle et comprirent qu'ils n'étaient pas réunis autour du roi pour trouver un remède à son mal, mais pour faire son oraison funèbre et assister à sa mort. Ils joignirent les mains et le silence du deuil emplit la chapelle. Après un moment, chacun sortit à son gré.

Seul Brahma Ménard était resté dans un coin, silencieux et attentif.

Plusieurs minutes passèrent, l'air était chargé d'un épais silence, un silence de velours dans lequel on se frotte et se prélasse. Brahma se leva et se dirigea vers le monarque assoupi. En effet, bien que les habitants de l'île avait conclu à sa mort, son corps, lui, vivait toujours. Il s'approcha de l'autel et contempla le monarque dans sa noblesse et sa majesté.

Il s'agenouilla près de lui et lui murmura; majesté, maintenant, réveillez-vous, vous devez libérer votre coeur avant de nous quitter. Il toucha son épaule et le roi ouvrit les yeux et tourna la tête. Il tendit la main vers la figure de Brahma.

"Brahma, en vain j'ai tenté d'exister. J'aurais voulu que ma grandeur s'accomplisse, j'aurais voulu régner et que ma bonté s'épanouisse. Mais ce ne sera pas. Je suis attendu ailleurs et mon mal sera ma mort. En exil, je suis parti et pour mourir, je suis de retour. Ni ici, ni ailleurs est mon royaume: je n'ai rien sur quoi régner. Voilà ma fin. Je suis un roi sec, un roi sans descendance et pour cela je dois mourir. Je dois partir pour laisser la place à ce qui est et cesser de prendre la place de ce qui devrait être et ne sera pas."

Il s'approcha de moi et me baisa sur la joue, raconta Brahma. Je sentis sa grandeur et son amour me pénétrer. Je lui dis: Majesté, votre grandeur, votre amour et votre souvenir vivront à travers nous.

Il regarda le plafond de vitrail au-dessus de l'autel et son regard s'illumina, attiré par la danse des couleurs et le chatoiement des tons. Il dit: Qu'il en soit ainsi.

Ses paupières se fermèrent et son existence entama son decrescendo tranquille. Une note d'orgue vibra et un enfant entama de longues volutes cristallines, mélismes intriqués qui accompagna l'âme du défunt dans l'au-delà.

Tel fut la fin de notre roi.
L'île la pleure.

Amen.

mardi 22 janvier 2008

Le roi errant

Il fait noir dans la Chapelle. Le Roi est couché sur l'autel et respire bruyamment. Parfois, il se met à gémir et son corps tressaille. Personne ne saurait dire de quel mal il est atteint: il est là depuis quelques temps et son état reste le même. En fait, il est plus calme. La princesse qui lui rend visite et le veille peut en témoigner. Elle le fait boire, lui parle, le lave, ajuste ses vêtements et s'assure que tout autour soit propre. Il est souvent très calme, respirant profondément, mais parfois son esprit semble s'animer, mais rien n'est décodable pour ceux qui le voient. Ses yeux ne s'ouvrent pas et sa bouche reste muette.

Parfois, une voix s'élève, un garçon dans le jubé chante. Aigüe et pure la voix s'élance dans le ciel et rassérène le roi tourmenté.

Combien de temps restera-t-il dans cet état?
Qui ou quoi réussira à le sortir de sa torpeur pour le ramener au monde des vivants, pour que la parole opère et que le cœur s'ouvre?

dimanche 6 janvier 2008

Le problème avec Terese

Le problème avec Terese, c'est qu'il est difficile de lui offrir ce qu'elle désire. Exigeante, impatiente, luxueuse: elle aurait besoin d'un environnement que, pour l'instant, je ne peux lui offrir. Ça fait un bout qu'elle ronchonne et là, elle en a marre. Elle veut spéculer, créer, dominer, bâtir, établir... et tout ce qu'elle trouve, ce sont des miettes, des perspectives bouchées pour son grand rêve et de la frustration à en revendre. Elle sourit bien sûr, parce que c'est une grande dame, mais à l'intérieur, ça bout et ça se désole. Elle commence même à me dire qu'être un artiste, c'est une option. Elle n'en était jamais venu à ce point.

Le problème, c'est que MOI, c'est que je veux faire. J'aime ça étendre mes idées comme une voile sur l'océan, créer des mondes, et des fois, les faire exister. J'aime que mon imagination brasse la matière et les pensées, révolutionne humblement le monde et les esprits. J'aime ça le dire aux autres. C'est ça que j'aime. Ce n'est pas compliqué.

Mais Terese souffre, elle en a marre. Du coup, moi aussi. Je pense qu'elle serait beaucoup moins chiante si elle pouvait s'exprimer, si je lui en donnais les moyens. De toute manière, il ne sert à rien de nier les membres de son C.A. et leurs aspirations légitimes. Comme pour Satan Brossard, diable et Adrianna Gourd, chanteuse d'opéra, je devrai trouver un moyen de panser sa souffrance et finalement, lui donner les moyens de son action. Mais comment?

vendredi 4 janvier 2008

L'enfance de Terese

De multiples hypothèses entourent l'enfance de Terese von Wartburg : certains commentateurs retracent une naissance de basse extraction, enfant issue des faubourgs de Dresde, d'un milieu banal et d'une famille sans couleurs ; d'autres vont même jusqu'à supposer que son ambition démesurée et son impérieux sens de l'industrie aient été une réaction à un milieu pauvre de moyens et de stimulation culturelle ; les biographes les plus avides attribuent la genèse de TvW à une prostituée de Hambourg et d'un marin estonien (Ironiquement, elle aurait répliqué à ce commentaire : "Voilà pourquoi à choisir je préfère être au-dessus qu'en dessous...") ; des sources plus crédibles, mais non-vérifiées, attestent que TvW serait née d'un père hollandais et d'une mère juive disparue lors de la deuxième guerre mondiale (À quoi elle répond : "J'aurais les deux tares nationales ! Avare et... avare!") ; quant aux suppositions de noblesse bavaroise catholique, elles semblent cadrer avec le personnage et son statut, mais les bombardements de S. en 1943, dont Terese se dit originaire, ont effacé toute trace des registres baptismaux ("Un coup de pouces des alliés !").

Force nous est de constater que l'enfance de TvW demeure mystérieuse. Lorsque l'on tente d'aborder le sujet avec elle, elle sourit et répond : "A-t-on réellement besoin de savoir de quel métal précieux ou de quel fumier proviennent les pigments de Leonardo ou de Michelangelo pour pouvoir admirer leurs oeuvres, dites-moi, vraiment ?"

jeudi 3 janvier 2008

Groin, le sanglier

Enfourchez le sanglier du changement!
Bien que vous fussiez chargés de scories et de miasmes, il saura vous amener à bon port!
C'est simple: vous n'avez qu'à vous accrochez à ses défenses et à vous lover sur son dos.
L'avantage d'avoir le rhume, c'est de ne pas sentir son odeur de musc, de racines et de champignons pourris. On trouve des avantages à tout!

Groin, groin, groin...

mercredi 2 janvier 2008

Terese Von Wartburg

Terese Von Wartburg,
Nouvelle membre de mon C.A. vous souhaite une bonne année.
Comme à elle-même, elle vous souhaite de la facilité, des offres ahurissantes, beaucoup d'argent et une dose considérable de mépris, pour tout ce qui n'est pas platine, or ou argent.
C'est derrière son porte-cigarette Klaussmann 1923 qu'elle hausse le sourcil en un mouvement-réflexe, aux usagers du transport en commun, à Hochelaga-Maisonneuve, à la qualité de la langue et aux magasins à un dollar.
Rien de mieux que du caviar sur des blinis en sifflant un champagne rosé Forget-Brimon!
"Sortez de votre médiocrité, ou n'apparaissez pas" aurait-elle dit lors du passage de 2008.

Ses multiples sorties ont troublé le modus vivendi de mon C.A. et ses frasques augurent plusieurs tensions internes pour 2008.
Parmi ces dits des derniers jours notons:
"Je suis épuisée que la réalité ne se conforme pas à mes souhaits"
"À quoi bon vivre à l'étroit"
"Ce qui m'entoure n'est pas cohérent avec la fibre qui m'habite"

Terese vous salue (et pourrait vous détester)!